Matin-Yoga dans la clairière, petite balade hygiénique avec le chien. Redescente vers St-Etienne-les-Orgues où nous attend, sous un glorieux soleil matinal filtré par les platanes, la terrasse au Bar du Ski-Club – Siège des boulistes. Le petit déjeuner se prolonge en flânerie heureuse, agrémenté de fruits secs, galettes bretonnes et de noix et de quelques conversations avec les locaux. C’est assez étrange de se dire qu’on est illégal, assis ici à siroter un café crème à une terrasse on ne peut plus banale. Enfin, dans une illégalité me semble-t-il très relative… sans doute illégale elle-même, bref, dans une illégalité illégale ! Le serpent se mordrait-il la queue ? Puis, le plein d’essence, halte à la fontaine pour y tremper et frotter la vaisselle de la veille (notre gamelle de camping) et achat d’une paëlla à emporter que nous dégusterons un peu plus loin dans les collines, en empruntant une petite route noueuse et chaude comme un pied de vigne, qui doit rejoindre Forcalquier. Sur ces hauteurs escarpées, la vue est dégagée mais la tentative de sieste sur un terrain en pente, parsemé de cailloux et de branches de genévriers – les traîtres dans leur piquanterie – se révèlera assez infructueuse, d’autant que pour une toute petite route comme celle-ci (à certains endroits on ne peut pas se croiser), il y a quand même un trafic étonnant… Cueillette de thym dont quelques pieds que nous rapporterons pour planter dans le jardin. Dans un tournant, un campement très sommaire et hétéroclite, à base de caravane, cordages, tissus, etc. Certains semblent vivre ici avec très peu de choses… et surtout, pas d’eau.
Visite de Forcalquier : la citadelle qui fait mal aux pieds ! Et qui pique les mollets (allusion aux moustiques dont je subis à nouveau les assauts).
Bonne grimpette sur un chemin pavé, raide comme la vertu. Les pavés de guingois appellent à l’art de la précision et à la sûreté du pas et, à l’ombre des cèdres du Liban, quelques bancs de pierre offrent au pèlerin l’occasion d’une halte miséricordieuse.
Tout en haut de la citadelle, très belle vue à 360 degrés sur le Ventoux, la Lure, les Alpes, le Mercantour, le Lubéron… La petite chapelle Notre-Dame de Provence y retrace l’histoire des Saints de Provence et d’Orient. De style néo-byzantin, elle a été construite entre 1868 et 1875 sur l’emplacement de l’ancien château des comtes de Forcalquier (détruit par Henri IV) et domine la colline, surplombée d’une statue dorée de la Vierge qui resplendit comme un soleil. La chapelle, de structure octogonale, est agrémentée de huit anges musiciens sur chacun de ses angles extérieurs. Sur la même esplanade, un carillon, construit en 1925 qui s’anime les dimanches et aux fêtes.
Sur le tympan extérieur de la chapelle (espace en demi-cercle au-dessus de la porte d’entrée), sont représentés en sculpture, debout autour du Christ glorieux, les saints d’Orient, arrivés de la Terre sainte en Provence (dont Marie-Madeleine, Marthe, Lazare, Maximin, Marie-Jacobé, Marie-Salomé, Sarah, Sidoine, Trophime…) et assis, les saints de Provence, dont Delphine et Elzéar de Sabran. A l’intérieur, une petite histoire des Quatre Reines de Forcalquier, les filles du comte de Forcalquier qui épousèrent chacune un roi : l’aînée, Marguerite, épousa Saint-Louis en 1234 à douze ans, avant de le suivre six années en croisade; la seconde, Eléonore, devint en 1235 la femme du roi Henri III d’Angleterre; la troisième Sancie, épousa en 1242 Richard, comte de Cornouailles, futur roi des Romains et empereur d’Allemagne; et enfin la dernière, Béatrix, épousa en 1246 le frère de Saint-Louis, Charles Ier d’Anjou, qui deviendra roi de Naples et des deux Siciles.

(Le comté de Forcalquier, séparé de la Provence en 1110 par le jeu d’une division, s’étendait des sources de la Durance aux portes de Cavaillon et ses villes principales étaient Embrun, Gap, Sisteron, Manosque, Pertuis, Apt et Sault. Il fut de nouveau rattaché à la Provence par l’union de Gersende de Sabran et Alphonse II de Provence, les parents des quatre heureuses filles, avant d’être rattaché à la France lors du siège de Forcalquier par Louis XI en 1481.)
De cette colline coule une source, Font Calquier, ou Fontaine calcaire… qui a donné son nom à la ville.
Redescendre en ville c’est comme redescendre dans l’air du temps, dans l’ère de la modernité, dans les klaxons et les petits deals… Au bar le Lucky où nous prenons l’apéro, j’ai une pensée pour mes chats (Lucky & Luke) et tandis que l’on se renseigne sur un coin sympa pour dormir, on nous met sur la piste des Mourres, site géologique exceptionnel de formations calcaires, juste au-dessus de Forcalquier, où nous pique-niquons le soir avant de nous installer pour la nuit.