Le pouvoir de l’instant

Ferme tes yeux, tes oreilles aux horreurs du monde

plonge en-dedans

regarde la merveille qu’est la vie en toi …

respire, respire, respire,

ne te laisse pas abattre

la seule chose qui compte

c’est l’étincelle en toi

qui vit, qui brille, qui rayonne

et qui porte en elle

le germe d’un monde futur,

d’un monde meilleur

Fais grandir cette graine,

jour après jour,

patience dans l’azur …

arrose-la, nourris-la, parle-lui tendrement,

donne lui de l’amour,

assure-toi qu’elle n’a pas froid

ni trop chaud, ni trop au sec

prends soin d’elle comme un nouveau-né

fragile et tout plein de l’espérance qu’il porte

Ecoute cette petite voix discrète en toi

celle qui te dit de ne pas baisser les bras

celle qui te donne la force

de sourire et de chanter, encore …

Qui est chaleur, qui est lumière

cette petite flamme au fond de ton coeur

qui se redresse après chaque tempête

Il n’y a que l’instant qui compte

et en lui réside le pouvoir de l’atome

celui de faire tout imploser

et changer la façon dont est conduit le monde

Ecoute cette petite voix,

pardonne, rayonne, rassemble tes souvenirs

Fais de ta vie une danse

gère tes échecs, tes déprimes

réjouis toi de tes succès

brille de ton feu sans vouloir écraser quiconque

respecte la voix de chacun

et son apport au monde

assume et continue ta route

le regard droit

la démarche sûre

l’aura d’amour qui te protège autour de toi

chaque instant est précieux

et porte en lui le germe d’un avenir radieux

Tu as le choix d’être heureux

Virevolte

Virevolte

Révolte qui sourd

grondement des vieux loups dans la forêt profonde

familière et féconde

qui nous ensemence et nous nourrit

Humus des années passées à comprendre, à grandir

Craquement sec dans la nuit épaisse

une branche enfin prête à céder sous nos pas

après des années de décomposition

la face de l’ombre

plonge son regard

en nous

fait volte-face

et libère la clarté qui dérange

Virevolte

Au goût amer des feuilles mortes

se mélangent les sucs des insectes qui grignotent

écorces, brindilles, pousses tout justes sorties

et les sables éphémères, en volutes émouvantes

se rappellent à notre conscience ensauvagée

en tempêtes

tourbillonnantes

de spirales enfumées

Lames de fond sur le gouffre de l’âme

qui cinglent tout sur leur passage

Virevolte

Tout revient tournoyer autour de nous

en longs lambeaux effilochés

à moitié digéré, à moitié consommé

tout revient nous obséder

demander son compte

travailler notre naïveté

en saccades obscures

cycles absurdes dont nous peinons à sortir

et tout tourne sans cesse

en vagues déferlantes

qui nous hypnotisent et nous hantent

Virevolte

Tout autour de nous n’est que pensées, émotions élaborées

émanant du monde subtil

Toute forme autour de nous s’estompe

des ombres se redressent et viennent réclamer leur dû

raclant le sol et rechignant à évoluer

avant de retourner en poussière

tout n’est que spirale du vivant

apparu, transformé, disparu

Virevolte

Tout autour de nous vibre et se dilue

comme des lucioles

dans l’air qui sature et étincelle

Tout n’est qu’Amour et confusion

Tout n’est que Paix et illusion

(c) DM

Le pouls de la Terre

C’est une large vallée entourée de falaises

ocres, rouges, chocolat

et ombragée d’oliviers

une rivière la traverse

au couchant

les roches s’empourprent de rouge flamboyant

chocolat, cannelle, orange,

rochers de pierre tendre,

façonnés par le vent, la foudre, le gel, le soleil et l’eau

sable blond

où crapahutent léopards, babouins et marmottes

lézards, petites antilopes

où le jour s’écrase en une chaleur tournante

comme dans un fourneau

rochers pulvérisés

chaleur dense rivière cascades et piscines enrochées

vent éclair orage tourbillonnant 

horizon tournoyant

le cœur de la terre qui pulse

vallées fertiles et roches desséchées

atomisées sous l’effet du soleil 

où alternent

canicules et inondations

où poussent les citrons les mangues les abricots les amandiers et les olives

falaises déchiquetées

buissons piquants aux senteurs acides

herbes citronnées et amères

arbustes aux odeurs de terre

étoiles explosées comme des diamants

nuit pure, vénus incandescente

ciel abondant en légendes anciennes

terre ancestrale des bushmen

peintures évoquant les transes chamaniques

invocation à l’esprit de l’éléphant

pour guérir le monde

les feuilles chantent au murmure du vent

comme des gouttes de pluie

un petit bout de provence un petit goût d’algérie

au bout du monde retrouvés

(Monts aux cèdres, Afrique du Sud, mars 2022)

(c) DM

The Pulse of the Earth

It is a large valley bordered by sandstone cliffs

shadowed by olive trees

a river runs through it

blocks of rock of potent origin

scissored in lacy designs

by lightning, water, sun, frost and wind

forced into shapes never seen

orange, terra-cotta, cinnamon

and the green, the evergreen of life

the scent of soil and acrid bushes

pungent leaves of thickets

wind sand and scorching rocks

lizards and duikers

ancestral land of the Bushmen

where live the leopard, baboon, antilopes

extreme land

either withered with heat or flooded

where grow the olive, almond, citrus and mango

stars exploding in diamonds

ancestors stories abound

a planet bright as a lighthouse

silence, wind, stars, rock,

sun, moon, water, birds,

river, cascade, hand paintings

rocks carved by the elements

heart of the earth pulsing

beauty beyond all thinking

majestuous features

parchment land, sizzling sandstone

hieratic cliffs

enigma demanding an answer

millions of years engraved in these rugged shapes

proteas, ericas, dassies and butterflies

discreet animal life, programmed to survive

bushes turned into gnarled shapes

colours as vivid as the sky

big skies as blue as the ocean itself

wild ether, unaffected

by the turbulence of humans below

sunsets baking in accomplishment

mountain, steady wall of ochre, red, chocolate

iron filaments in the stone

the elusive presence of the shy cape cobra

weaver birds, guinea fowls,

and the million invisible life

ever struggling for perpetuation

Life, ever evolving, ever transforming itself

mineral reign, animal, vegetal, and human, cohabiting

exchange of the hearts, bleeding with love

echoes of ancient memories

genes pairing and assembling

my genes responding to the call

Inner, irresistible call of blood

cellular coherence, proximity

Life in its kingdoms, ever renewed,

cells responding to each other

Desert call

Silence of the subtle matter

in the wind’s soft murmur

Vibration

Harmony

Life passed on a million years

astral light, merciless heat

rooted soul of the elements

the joy of leaves fluttering in the wind

making the sound of rain drops

windows shut to the scorching afternoon heat

the soft carpet of grass

giving in under the feet

foot imprints shaping the sand

paths of human and animal kind

rock paintings telling stories

of ancient shamanic trance

calling unto the elephant spirit

to come and heal the world

Very old tales told and seen

traces of ancient remedies

memories of past things

lived and gone

I want to stand up and scream : Happiness !!

(Cederberg, South Africa, march 2022)

(c) DM

Poésie du chaos

Des lumières, des traits et des couleurs

Tout est futile, clinquant, superficiel

Fuite, aveuglement, illusion

Matériel et pourtant tellement irréel

Reflets d’une chimère

Issue du subconscient commun

Nourrie par les egos et la peur des humains

La folie des grandeurs

Et le besoin de tout prévoir et contrôler

Dans une société algorithmée

……..

Et pourtant tout cela

Prêt à s’effondrer

A s’effriter au moindre souffle puissant du Ciel

A la moindre divagation de la Mer

Au moindre frisson du dragon endormi de la Terre

Un coup d’échine et tout s’estompe

Se fracasse, se brise en mille éclats

Et plus rien ne restera

Que poussière, cendres et mystère

Et la nature reprendra ses droits

……..

Pour ne plus rien laisser 

Que des vapeurs bleutées

Un ange effarouché 

Le claquement d’une aile diaphane 

Se tordant dans l’ether saturé

Vestiges d’un rêve agité qui au matin se dissout

Dont les échos seuls demeurent et 

Respirant encore un peu

Du dernier souffle des chimères terrassées

……..

Tandis que flottera une odeur de métal

De caoutchouc brûlé et de produits chimiques

Souvenirs de la société engloutie….

(c) DM

Epoques

Une porte se ferme

D’autres s’ouvrent

La Vie est portes, fenêtres et poignées

Charnières, passages en courants d’air

Volets ouverts ou fermés

Petits moments volés à la table d’été

Loquets rouillés,

Suintement de suie par la cheminée

Au Jour, les vaguelettes polissent nos coeurs usés

A la Nuit, le Destin s’apaise et l’inconscient se nourrit du présent

A tâtons, dans le Clair-obscur,

Nous poussons des portes et ouvrons des fenêtres

Asphyxiés par l’air renfermé de la maison secrète,

Les scènes de déjà-vu, les pincements de coeur, les nostalgies aigües…

L’air étouffe au-dedans et oppresse au-dehors !

Les dédales d’escaliers et de couloirs se succèdent –

On ne reconnaît pas les lieux :

Par où sommes-nous donc passés ?

Les doigts, agiles, tournent des poignées, lisses ou carrées,

Ecorchent les toiles d’araignée

Nos yeux sont embués par la Pluie

Le bout de nos doigts, hypersensibles,

appréhendent le réel

Scintillants comme des antennes

et sensibles au moindre frôlement

Nous effleurons les portraits des âmes aimées

A la recherche d’un signe ou d’un retour fugace

« Comment en être arrivé à renier cela, à prendre ce tournant, ne pas voir celui-là ? »

Les placards se taisent et les tiroirs muets,

Gueules béantes, à moitié seulement

délivrent leurs secrets.

Le Secrétaire est resté ouvert,

un porte-plume à l’encre séchée,

une lettre d’amour inachevée…

Dans la cuisine, bien rangée,

deux casseroles de cuivre brûlées

Quelques miettes sur la toile cirée

A la Cave un grand escalier

dont nous connaissons une à une les marches

leur largeur, leurs aspérités,

et le dernier échelon cassé

Le soupirail distille un peu d’air fané

Au Grenier, l’odeur de sable, de pastèque et de fumée

Des vieilles malles au cuir doré, mal scellées,

Dégorgent de quelque robe à l’odeur de bière, au fumet du passé,

quelque photo endimanchée

Mais notre coeur frénétique

fouille encore les coins cachés des choix, des absences, des inconscients désespérés

des attirances et inimitiés, trahisons, échéances et espérances

Et craquent les lames du plancher,

Et tombent quelque écailles de plâtre coloré…

Les chambres sont tranquilles,

Certaines dans une paix immobiles

Un rayon de soleil, par les persiennes,

joue avec la tenture du lit…

D’autres, un tantinet agitées

tressautent encore d’un cinéma muet

dont nous connaissons bien les paroles,

mais avons oublié le dénouement

Jusqu’à trouver la chambre,

où tout se résout,

tout se termine…

Le Salon, doux et écorné –

tendres paroles sous le plafonnier –

et la Table sous le platane

Où se tinrent tant de déjeuners

La Salle-à-manger rustique

où le couvert déjà mis, classique

sous l’oeil des portraits de famille

nous fait un clin d’oeil hiératique

Dans la salle-de-bains victorienne

rôdent des nudités exquises

dansent des abandons et des provocations,

des défiances insoumises…

Et sur le chemin de gravier,

quelques pommes sures ont tombé

l’appentis est mal fermé

les charnières du battant déglinguées

Les réserves de bois, bien étagées

et les outils sont rangés

Et tout au bout du jardin, ô surprise

Parmi les ronces et les cerises,

un vieux ballon crevé nous sourit …

(c) DM

Note : la Vie est choix perpétuel, parfois conscient, souvent inconscient

Et tout ce qui ne s’est pas fait a fertilisé nos projets,

nos amours, notre avenir

et nos aspirations les plus intègres et néanmoins les plus dures à manifester

Ce poème est une ode aux choix évincés, aux non-dits, aux non-choix, à nos désirs, à nos regrets, et à tout ce qui nous a faits et défaits….

Kyrie

La Vie en son chant tisse notre avenir

Un chant grave et serein

Ruban de soie et de fil qui défile

Et se délie, intime, au large de nos doutes

Celui qui l’écoute saura être guidé

Lui qui ne l’entend pas aura maints fracas

maintes tempêtes, maints naufrages

Les jours n’ont plus la candeur d’antan

Mais comme ils seront lisses encore ! Et doux comme

Un couchant apaisé sur la mer

Et toi, toi qui ne sais plus où tu vas

Toi qui pleures avec les étoiles dans lesquelles tu cherches un compas

Toi qui ris dans ton cœur quand ton cœur chante tout bas

Quand tu as vécu tout cela

Quand, lasse et furtive, la nuit te glisse entre les doigts

Quand tu n’as plus de honte ni de peur

Toi dont l’amour est si grand

Qu’il transpire à chacun de tes pas

Entends-tu souffler le nordet ?

Bruisser le corps des sirènes ?

Car la vie tapie en toi comme une murène

Prête à bondir à la marée nouvelle

Ancrée au fond de toi, saura te renouveler

Viendra te délivrer

Te pousser vers la mer

Te faire sentir à nouveau sur tes paupières

Le vent ivre de liberté

Car il est dit que dire n’est qu’un premier pas

Et le mot qui te dit n’est pas encore écrit

(c) DM

Avant que j’oublie

Avant que j’oublie

les mots les colères

Avant que j’oublie

de dire et de taire

Avant que ne grandisse le silence

Au fond du silence

des notes dansent

elles ne comprennent pas

mais elles savent

Avant de saisir

la main du destin

de m’en faire un ami

Il sourit au loin

fort de ses incertitudes

Loin des tumultes loin des envies

loin des extases et des agonies

quelque part au fond tranquille

coule la source

toujours vivante

et sidérante de beauté

Quelque part passant si tu vois

sacrifiés ceux qui chantent aux étoiles

découvre-toi

Avant que ne se délie

cette existence terrestre

bafouée, galvaudée

mais aussi aimée dans toute sa gloire

Autant pour ceux qui la renient

elle n’est ni simple ni jolie

Que de ceux qui en font trop

elle s’enfuit

Avant que ne se referme une fenêtre

avant que ne se glisse l’indifférence

soyeuse dans tous ses replis

Avant que j’oublie

la clé des profondeurs

Laissez-moi encore chanter !