D’humeur vagamonde

Vague à l’âme

vague au monde

d’une vague à l’autre

mon esprit erre et vagabonde

d’un monde à l’autre

une vague m’emporte

et un vague sentiment

de m’être trompée de monde

me submerge

Un pressentiment vaguement familier

m’assaille encore

des murs d’ondes liquides

forment une vague frontière

pour atteindre l’autre monde

alors je m’égare

dans les nimbes de l’entre-deux-mondes

et le port d’attache

d’un esprit qui divague

se fond dans l’horizon gluant

englouti

dans les brumes crépusculaires

de mes vagamondages !

(c) texte et photos DM 2025

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Surtout, parmesan à personne !

petit poème gratiné

Ce matin en me réveillant,

j’avais un trou dans le mental

j’ai entendu un brie qui court …

Serait-ce encore ce fichu thème de gruyère ?

J’ai cherché un coin de ciel bleu d’Ecosse

remis dans l’âtre une bûchette de mi-sec

ai lâché un crottin de Sèvres

lissé mon plumage de brebis

me suis remémoré cette soirée vacherin chouette

hier après l’ascension du Mont d’or

où l’on n’a pas comté ses efforts

J’ai tiré la langue à la tâche-qui-rit

sur la table, une poule de mozarelle

m’a pondu quelques olivets

Pour ne pas confronter la cruelle-des-champs

j’ai fui dans la brousse-aux-herbes-de-morse

j’ai couru comme une folle, hé, poisse !

car ici les camemberts sont rudes

– on se caillait la meule des alpes –

bref, j’ai croisé un fort beau roquet

qui chantait un cantal de Bach

comme un boursin mal léché

Par ce froid – un vrai concours de caillotte –

il faisait un reblochon de sa voix

et n’en finissait pas de se raclette la gorge

J’ai prié : soignon-nous bien !

et des livarots-nous du mal

C’était au jour de la saint-nectaire

les cloches sonnaient à toute Vully,

rouges comme les fourmis

qui convergeaient vers Ambert

Pardou ! pour un soufflé dans la corne d’abondance

j’aurais donné mon coeur de chèvre

Voulant lancer un pavé du Larzac (je me marre)

à peine Zeller était-il sorti

que j’avisai un grand gouda au cul mince

et me saisis d’une clé à mimolette –

à défaut d’une volée de chevrotine –

(j’m’en vas te me l’bichonnet çui-là, me dis-je)

pour le réduire en fromage frappé

mais surtout parmesan à personne !

(car malgré le volume de ses tommes

je n’ai jamais aimé ce mormon de Zola)

La suite ne manque pas de piquant

j’ai replongé dans le bouillon

et pour garder la serpette froide

j’ai décidé d’éplucher des savattes

d’y ajouter des champs de pignons sautés

quelques marottes râpées

avec une belle tronche de pain

un filet digne d’Ovide

quelques crins de poivre

une pincée de fiel

et le four est joué !

Voilà de quoi me faire cuire un boeuf

m’en mettre plein la trempe

me régaler d’une triphasée de museaux

je m’en pourlèche déjà les salines

le tout arrosé d’un demi-pitre de cidre

et assaisonné d’une delphine-aigrette !

(c) D.Marie

photo getty images

Napule è

haïkus napolitains

Lisez en écoutant :

« Napule è » (Pino Daniele & Eric Clapton)

https://music.youtube.com/watch?v=iZlO0R6AbiU

Ruelles d’ombre et de vent

où rarement le soleil descend

tranchant dans le cœur de la ville

comme une saignée


San Gennaro,

penses-tu vraiment

qu’il existe une réponse

à chacun de nos problèmes ?

Et peux-tu nous guider,

nous libérer de nos peines ?


Golfe étincelant

aux accents chantants

dont les rives se baignent

contre nos rires

d’or et de rose



Vierge lumineuse

ton sourire s’est éteint

sous les balafres du monde

mais ta force rayonne

à travers tous ceux

dont tu perces le regard


Tout ce chaos criard

grouillant de vies multiples

et, au milieu,

une rose, offerte

par un serveur aux dents gâtées


Tables, passants, motos, vespas,
un taxi zigzague dans le labyrinthe
sur son passage la vie s’éparpille
éclaboussures de rires et de cris


Sur la rive absente du golfe

un homme attend son amour aux yeux verts

elle est partie loin, très loin

dans les remous des vaguelettes

un visage se dessine

en transparence

celui d’une histoire

sans fond, sans fin


La mer ne sent plus rien

ni les cris des oiseaux

dont le son s’étouffe

dans le silence profond

que rien ne perce

pas même le tumulte de la ville


Alluvions, cendres,

couches après couches de cités

allées pavées, thermes,

labyrinthes effondrés

lieux de cultes engloutis

foulés par des milliers de pieds

il y a des milliers d’années

Vestiges fragiles, presque risibles

d’une brillance éteinte

d’une gloire disparue

comme celle d’aujourd’hui,

dans son inutile vanité

le sera un jour

Clin d’œil de l’histoire

d’où des milliers d’yeux nous regardent

par un trou entre deux pierres

Splendeurs des puissants

misérables aspirations des faibles

merveilles des civilisations

stratifiées dans les collines

vague après vague d’habitants

arrivant de la mer

Dans les ruelles profondes

aux odeurs de poisson et de citron

s’élèvent des clameurs

s’envolent des douleurs

s’effondrent des illusions

se réveillent des bonheurs…

et se prend le pouls de Naples.


Au bord du Pô

Tendre saule vert de printemps

tes branches souples au vent

laissent filtrer la lumière

tout en m’enlaçant

Saule gai et vivant

tes bras de vent

soufflent sur mes cils

un parfum d’éternité !

(c) Delphine Marie textes et photos

Clair obscur

Noces délicates de la fleur et du vent

De l’ardeur et du sang

La bonheur comme un gant

Clameur nocturne insensée

Je ne sais rien je ne veux rien

Je ne sais rien

Je ne sais rien

Que le souffle des vagues, la tendresse du vent

Je ne veux rien

Que le brin de soleil qui joue dans mes cheveux

Je ne sais rien

Que le parfum de sable qui se donne à moitié

Et la note du temps

Et le regard amoureux que la nature pose sur moi

Je ne sais rien mais je sais

Que la fin d’une étoile est le début d’une autre

(c) DM

Il était une fois…

4–6 minutes

C’est l’histoire d’un lutin des prés
Qui aimait gambader
Tout joli joli

Tellement joli que tout un chacun
Voulait se l’approprier

Lui ne pensait qu’à courir
Libre comme un papillon
Et butiner de ses doigts dorés
La nature en ses bienfaits

Autour de lui sans y penser à mal
Tous les animaux des bois, des prés et des marécages
Et même tout lointain là-bas au pays de l’En-Mer
Et au-delà dans les savanes et les cîmes enneigées
Le voyant passer, voulaient l’attraper

« Oh joli lutin des prés des prés
viens par ici que je te touche, que tu me souries
que je t’attrape et te caresse
que j’entende ta voix enchantée
et ton rire ruisseler comme des goutelettes nacrées
de tes jolies petites dents je veux sentir la morsure
de ta peau de velours je veux toucher la douceur
de tes jolis petits yeux de perle
je veux comprendre le regard
je veux grandir à tes côtés
te tenir fort, te retenir ! »

Or le petit lutin voulant faire plaisir
souvent se retrouva pris au piège
car il aimait sincèrement
tous ceux qu’il rencontrait
la chouette hulotte et le faon
la fourmi et le renard
le chat et l’araignée
et les mouches et les éléphants

et aussi ses confrères humains
le peuple des élémentaux
petits lutins de la forêt
fées, elfes et farfadets

Alors de temps en temps, il s’arrêtait dans une hutte
dans un champignon-maison
sous une frondaison
dans les branchages ou dans un palais
partout où logeaient ses amis

Il parlait, il rassurait, il comblait et se laissait combler
On le nourrissait, on lui chantait des chansons
on le gâtait de toutes sortes
si bien qu’il y prenait goût aussi

Mais il ne se rendait pas compte
Que même chez les gens bienveillants
Il y avait des pointes d’envie
On voulait lui voler son aise,
On enviait sa décontraction
La chance qui lui souriait dans la vie
Parce que tout lui réussissait
Car lui qui avait un bon rapport à tout le monde
Ne se faisait pas d’ennemi
Mais son ennemi c’était l’envie
On voulait lui soutirer sa parole,
Sa lumière, ses longues jambes,
Sa liberté, son air auspicieux,
Son aise et sa prestances gracieuse
Sa loquacité, son audace,
Et son caractère généreux,
Sa joie de vivre et son maintien,
Bref tout ce qui lui appartient

Et bientôt sans s’en rendre compte
Car en surface tout était gai,
Il songea de tristes pensées
Des idées noires et maléfiques
Des désirs morbides et des oeuvres sataniques
Car en fait c’étaient le flux
Des envies et des jalousies
Des ombres noires et des manigances
Qui finalement l’atteignaient
Et ternissaient son apparence

Tant et si bien qu’un jour il vit
Clair comme une flamme pure
Qu’il y avait perdu son âme
Et laissé échapper le sens de sa vie

Alors le petit lutin un peu triste
Se retira dans son manoir
Sous la mousse du grand chêne
Il médita, médita, médita longuement
Chanta des psaumes et se fit des onguents
Pria le ciel et tous ses éléments
Il pleura beaucoup, rumina
Et même parfois voulut mourir
Il se dit c’est bien dommage
Que sur cette magnifique Terre
Chacun ne puisse à son avantage
Avancer comme il peut et faire taire
En soi ses mauvais élans
Plutôt consacrer son temps
A faire prospérer ses talents
Par pour soi seulement
Mais aussi pour les autres
Pour contribuer à vivre ensemble
Dans une société où chacun a la place
Qui lui est impartie à la naissance
Avec cette part d’acceptance
Et de résignation, mais aussi d’optimisme
Et de joie d’être vivant
Que cela simplement comporte

Pour sa part, il réfléchit sur le sens de sa vie
Se réappropria ses désirs
Et voulut tout recommencer
De zéro, mais différemment
Il apprit qu’en se dispersant
Il avait creusé des sillons
Élargi des failles sans le vouloir
Dans la carte de sa destinée
Affaibli son chemin de Vie
Laissé entrer ce qui ne devait pas
Et laissé s’envoler le fil d’or
qui constituait son bonheur

Alors il prit la résolution
De n’écouter plus personne
Que de sa petite voix la chanson
De reprendre ses pérégrinations
Mais sans trop s’écarter de son chemin
Et tant pis pour tous ceux qui râlent
Qui lui fairaient des grimaces sur le bord du chemin
Ou qui seraient déçus
Car cette fois-ci il ne s’arrêterait plus
Ou très peu, seulement
Pour une poignée de main, un baiser, une rencontre
Mais sans s’attarder, tout en faisant le bien
Là ou il le pourrait
Et même les plus heureux
Ou les rois tout-puissants
N’y prêter que peu d’attention
Mais en gardant toujours à l’esprit
Que le plus important pour lui
Était de préserver son trésor
Celui qui ne se partage qu’au compte-gouttes
Par peur de le voir se ternir
De le voir démolir et avilir
Si on le sort devant tous les yeux
Y compris ceux des envieux

Alors il y eut de difficiles décisions
Des reculs, des adieux, des partitions
Et petit à petit au fond de lui
La clochette enchantée se remit à résonner
Ding, ding, dong
Trois petits coups pour lui redonner
L’envie de chanter et de danser
Et de courir de par les prés
Guilleret et d’offrir au monde
Ses chansons et ses oraisons
Ses prières et sa gaité
Sans plus se soucier
De ceux qui l’entendraient d’une mauvaise oreille
Il irait chez ceux qui ne trahissent point
Et chercherait des alliés parmi les Authentiques
Ceux dont le cœur pur est toujours là pour servir
Ceux qui ne renient point les atouts
Que leur a donnés la vie
Et ne se trompent point de combat
Et savent partager la joie
D’être là d’abord pour soi,
Et ensuite pour les amis,

Mais quand on dit toujours…
c’est tous les matins et tous les jours
de la sainte vie que l’univers nous octroie
et dont le monde nous bénit
Soirs et matins et encore les nuits
Fidèles à cette nature enfantine
Qui reste maître en la demeure
Qui constitue notre essentiel
Et que trop, lâchement, laissent tomber.