Chaque année, de nombreuses communes du Valromey, comme ailleurs dans le Bugey, font chauffer le temps d’une fin de semaine leur ancien four communal pour vivre un moment de convivialité entre habitants et confectionner des tartes salées (oignons, noix) ou sucrées traditionnelles ou des pizzas. Celles-ci sont vendues aux passants et aux visiteurs lors d’une journée de manifestations qui comprennent généralement l’incontournable buvette et parfois une animation musicale.
Ces fours étaient taditionnellement appelés four banaux : chaque commune et même chaque village et hameau du Bugey détient en général un four banal, hérité des temps médiévaux où les seigneurs, en échange de leur protection, prélevaient un ban, soit un dû, sur les pains cuits par les fourniers, les boulangers de village, pour le compte des villageois. Chaque famille apportait son pain à cuire et la grosse bûche de bois pour le cuire. Le plus souvent cette redevance était prélevée sous forme de miches de pains ; le seigneur en contrepartie se devait également d’entretenir le four et le chemin qui y menait.
On cuisait le pain pour la semaine ou pour la quinzaine, de grosses miches avec une croûte bien épaisse pour lui assurer une longue conservation. Les fours banaux constituent le patrimoine le plus caractéristique de la région du Bugey, avec les travails à ferrer les boeufs et les chevaux, les puits, les lavoirs et les chapelles.
Les fours banaux du Bugey sont un héritage à la fois architectural et humain qui reprennent vie depuis quelques décennies grâce aux habitants des villages, à des associations ou des cercles faisant revivre le patrimoine lors d’une fête de village intitulée ‘fête du four’. C’est le cas à Lilignod, un hameau de Champagne-en-Valromey dans l’Ain, où le Cercle Regain a repris cette tradition.
Lilignod a eu la chance d’avoir pendant de longues années un boulanger traditionnel qui fabriquait et cuisait dans son four à pain personnel du pain traditionnel artisanal au levain, cuit au feu de bois. Ce dernier participe à la fête du village en confectionnant la veille la pâte pour les pizzas et les tartes au sucre de la fête du four, qui va lever pendant la nuit, ce qui confère à ces gourmandises une qualité particulière. Tous les habitants se lèvent à 4h du matin pour étaler les pâtons et garnir les tartes au sucre de beurre et de sucre, et les pizzas d’une délicieuse sauce tomate et oignon maison confectionnée par une habitante ancienne restauratrice ainsi que d’autres produits locaux : beurre de la fruitière du Valromey, jambon des élevages proches, etc. Les gaillards quant à eux se mettent au feu de bois dès le jeudi soir afin que le four soit bien chaud dans toute sa masse pour la cuisson du samedi, puis enfournent et défournent dès 7h le matin. Déguster ces tartes et pizzas chaudes sorties du four est un véritable délice…
Samedi 13 septembre 2025 : fête du four à Lilignod (Valromey)
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Voir aussi, sur le patrimoine du Valromey et du Bugey :
Faut-il penser Quand le jour efface les étoiles, Qu’entre deux mondes il n’y a rien ? Et si, dans le moment fugace qui les relie, Se trouvait la réponse, l’Infini ? Ne pas se laisser prendre aux griffes du Temps, Piéger dans la toile de l’Espace ? Comment raviver les mémoires du passé Qui s’estompent Comme les étoiles au matin ? Mais les étoiles existent toujours Elles ne sont qu’en attente, en sommeil, En latence, illusion de mouvement Elles semblent tourbillonner autour de la terre Inconscientes de leur propre danse, volcaniques, Patientes, elles attendent leur moment L’heure de leur retour en gloire Dans un ciel éberlué Qui les accueille sur son drap Sombre et de velours satiné Entre ce moment-ci et celui-là A l’heure où un monde bascule Il y a une infinité de possibles Un grand trou béant et immense Plein de nos espoirs et nos larmes Il suffit de lever le voile Et regarder l’instant passer
à Jordan, ami parti
juin 2024
photo Jerome Avonde (fb), Côte de granit rose, mai 2024
L’être précède la pensée ! Ce n’est pas la pensée qui détermine l’existence de l’être, c’est la conscience de l’être qui permet à la pensée de se développer.
Il est temps de remettre dans l’ordre ce paradigme cartésien dans lequel nous avons tous été formatés dans nos études (à une époque où l’école enseignait encore quelques notions de philosophie) et selon lequel la preuve de mon existence réside dans le fait que ma pensée fonctionne !
Ce n’est pas la pensée qui crée la conscience, c’est la conscience qui permet à la pensée de s’exprimer.
image générée avec l’IA : « un esprit conscient qui se connecte avec l’infini de son existence »
Ce n’est pas la pensée non plus qui permet de percevoir l’être : l’être pré-existe dans toutes ses potentialités dès le moment de la fécondation, il se déploie dès cet instant dans les qualités de son existence, de son âme. L’être se perçoit par l’intuition fondamentale que nous sommes vivants, qui est une intuition non pas rationnelle mais une sorte de connaissance immédiate et certaine, inéluctable, indéniable.
Seule la conscience de mon existence permet alors au mécanisme de ma pensée de se développer et d’élaborer des théories, d’analyser ses ressentis et son environnement, de tenter de mettre des mots et donner un sens à tout ce qui me traverse, pensées, émotions, perceptions des sens, mémoires…
Si je n’avais pas conscience d’abord de mon existence, je ne serais qu’un mollusque parmi d’autres ou qu’une bactérie grouillante cherchant à se reproduire et à survivre. Mais si je considère en premier lieu la conscience que j’ai de ma propre existence, alors cette conscience constitue la base qui me permet de me distancier, me décoller de cette simple existence, et dans ce recul de tenter de comprendre le mystère qui entoure le fait même que j’existe.
La conscience est primordiale, et permet d’appréhender le fait que je suis en vie – même si je ne comprends ni comment ni pourquoi. Cette première « pensée » en quelque sorte, donne lieu ensuite à tous les développement habituels de la pensée : le fameux qui suis-je, où cours-je et dans quel état j’erre… Tous ces développements de la pensée sont permis par le fait que c’est ce « Je » qui pense, ce « Je » primordial qui constitue mon existence plutôt que mon identité, et qui appartient à un domaine, un royaume, un univers que je ne maîtrise pas. Ce « Je » primordial est donc l’essence même de mon existence et se rattache à un « Je » plus indéfini, que l’on pourrait appeler le « Soi », qui constitue la Source de tous nos « Je » réunis, l’Origine.
L’identité que nous nous forgeons n’est qu’un exercice de la pensée pour tenter de cristalliser et contrôler ce « Je » qui nous dépasse par sa grandeur originelle. Nous tentons alors de le rapporter à des dimensions plus modestes, afin de parvenir à en faire un élément maîtrisable.
Le petit « je » social, le « je » familial, le « je » culturel et historique (imprégné de son histoire) – qui sont tous des « je » pensés – ne sont alors que le pâle reflet du « Je » créatif qui a fait de nous des êtres vivants – et découlant, pensants.
A partir de cette constatation, on ne peut que tenter de se libérer de ces multiples « je » qui nous manipulent, et se méfier de notre pensée cartésienne qui veut tout disséquer et réduire à sa mesure, pour retrouver le « Je » originel qui est là dès notre conception, et qui procède d’un mystère que nous devons admettre ne pas pouvoir comprendre ni maîtriser !
En fait, l’on s’aperçoit que, dans un sens ou dans l’autre, cette expression nous ramène au même point, pourvu que l’on entende la pensée comme outil de connaissance intuitive et non simple capacité à raisonner (qui serait la pensée logique).
Cette connaissance intuitive nous amène à une autre réalité : Descartes lui-même en conclut l’existence de Dieu, par le seul fait que l’homme peut ainsi penser son existence, c’est à dire concevoir le « Je » profond et intuitif. A l’instar des grands maîtres spirituels de notre siècle, il reconnaît que le simple fait de se ressentir comme existant – donc la conscience du Soi – est une preuve que Dieu demeure en nous. J’en parlais récemment dans mes Carnets de l’Inde : « Le sentiment le plus immédiat de chacun, « Je suis », n’est pas une illusion mais une expérience réelle et intuitive » écrit Chandra Swami, grand sage indien, dans son livre, l’Approche du Divin. « Il est impossible d’expérimenter « Je ne suis pas »... Dieu, dont l’existence ne peut être prouvée de manière rationnelle, peut alors néanmoins se révéler comme évidence intuitive : il serait donc le « Je suis », notre véritable Soi.