Les jours qui dansent (plain-chant)

Poésie en musique

Voici l’un de mes poèmes lu en musique, afin de créer l’ambiance que j’ai souhaitée dans mon recueil Chants d’étoiles

musique : Hildegard Von Bingen, O nobilissima viriditas

(Richard Vendome, album Angelic Voices from a medieval abbey)

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Illuminations

Hier soir, après l’averse, un ballet de lucioles s’est déployé sous nos yeux ébahis :

au ciel noir, marbré de bleu sombre et de gris,

vivantes comme des yeux, entre les taches de nuages,

des étoiles intermittentes faisaient leur spectacle ;

sur les talus luisants de pluie,

petites guirlandes chinoises clignotantes

qui nous faisaient des clins d’oeil, encore tout engourdis,

des vers luisants par dizaines, fourbissant leurs lampions pour éclairer la nuit !

DM (c) sept. 2025

Je suis partout

Je suis dans la goutte tremblante au bord d’une feuille

je suis dans l’éclair

dans la voix qui clame ou réconforte

dans la fleur et l’arbre

Je suis dans l’espace lointain

dans les cîmes, dans le cristal

des neiges éternelles

je suis dans l’arc-en-ciel

et au fond des océans

Je suis sur la banquise

dans la forêt amazonienne

dans les atholls et dans les nuages

au-delà des nuages aussi

je suis

Dans les entrailles de la terre

dans la lave du volcan

je suis dans le vent qui hurle

dans la spirale

dans l’escargot

dans le métal et dans le feu

je suis dans l’aiguille de pin

dans l’étoile aux confins de l’univers

je suis dans la pierre

dans l’eau vive qui jaillit

je suis dans la biche, le lapin

le cerf, l’ours et le renard

Je suis dans l’amour

dans la joie

dans les pleurs et la détresse

je suis dans les chutes vertigineuses

dans le vide

dans le silence et dans l’absence

Je suis dans le brin d’herbe

dans la noirceur et la lumière

je suis dans la nuit

dans l’aurore spectaculaire

je suis dans les os, dans le sang

dans les profondeurs du cœur

je suis dans ce corps

qui aime, qui souffre et qui rit

je suis Cela

(c) DM avril 2025

25 décembre

Note de lecture

Fragments d’un paradis, éclats du merveilleux

Étrange petit bouquin que celui-là, où Jean Giono, contrairement à son habitude, ne nous emmène pas dans les collines odorantes de la Drôme provençale, mais sur les flots des mers du sud, dans une quête hypothétique de sens, de ce quelque chose qui peut donner à la vie, la saveur de la joie, du bonheur, et à l’homme, le goût d’aller de l’avant, de se sentir en accord avec ce pourquoi il est né : l’aventure, l’accomplissement, le mouvement, le chemin, bon ou mauvais, juste ou discordant, mais toujours dans un sens, vers quelque chose, une direction.

L’éditeur, Gallimard, sous la plume de Bertrand Poirot-Delpech, parle au dos de ce petit bouquin de « l’art poétique de Giono », de son « imaginaire verbal ». J’y verrais surtout moi, dans ce livre – petit bijou posé sur le ressac, ballotté par les flots de l’imaginaire de l’auteur, qui atteint et rejoint, à notre corps défendant, notre subconscient à nous, qui en lisons les lignes – j’y verrais donc surtout, une sorte de conte fantastique, un petit traité du merveilleux. En effet nous sommes à la lisière des contrées de Jules Verne, Edgar Poe, aux confins des mondes enfantins de Pinocchio, de Peter Pan, de Rakham le rouge et de l’Île au Trésor, entre les doigts crocheteux des capitaines Fracasse, Crochet ou Nemo, dans les contrées mystérieuses abordées par Magellan, Jacques-Yves Cousteau, Haroun Tazieff ou Fridtjof Nansen. Il est question de mammifères marins fantasmés ou réels, de raie géante aplanissant l’horizon comme une île, d’un calmar monstrueux sorti des profondeurs pour des noces lubriques avec des albatros, de fulgurances d’étincelles électriques multicolores et de récifs imaginaires tout droits sortis de la terreur instinctuelle des hommes, en fait baleines frôlant le navire… Il est question du grésillement des étoiles et de la symphonie assourdissante qu’elles distillent tout au long de la nuit, réglée sur l’inclination du ciel et des constellations qui basculent graduellement dans leur course vers l’Ouest, d’un volcan inaccessible, d’une falaise de basalte a priori hostile mais s’avérant hospitalière… Il est question de profondeurs sous-marines aussi sombres que les tréfonds de l’âme, d’abîmes insondés où trébuche le bon sens, du mystère de la vie et de la mort, de survie, du vacarme des oiseaux, d’odeurs de putréfaction et de musc évoquant les grandes prairies de narcisses au printemps, de pluie incessante et sourde qui assomme et alourdit, dans ses tentatives d’agir, jusqu’au plus averti des hommes…

Tout un monde d’archétypes qui nous parle de terreur, d’appréhension, de fureur, d’impatience, de joie sauvage, de rugissement, du saisissement de la vie, du grand destin qui fait tourner l’horloge et sonner la cloche, de la simplicité possible de notre existence humaine, de l’acceptation, de l’embrassement, de la résignation, du plus simple accomplissement de leur devoir et de leur destinée par des hommes – marins, explorateurs, botanistes, zoologues – en phase avec les rênes guidant leur vie, qui écrivent l’Histoire sans même savoir qu’ils y appartiennent…

Étrange titre, Fragments d’un paradis, pour un étrange petit essai sur la vraie vie; féerique et faramineux, délicat et parfois monstrueux, dans lequel il me semble qu’on cherche à nous faire voir, de loin ou de très près, avec nos yeux d’aveugles, la magie de la vie, émergeant aux moments les plus inattendus du récit, les plus tendus aussi, lorsque tout semble immobile, lorsque l’inconnu inquiète et fascine, dans un suspens qui défie les règles de la résolution romanesque.

Fantastique voyage dans les profondeurs, chronique d’un monde oublié, aux confins des mers et des continents, dans les abysses de notre soif d’être. On y perçoit différents aspects de la vie de Giono, la guerre de 14 et ses horreurs, l’inassouvible soif de vivre, le chant du monde, la vie célébrée avec un amour, une fascination inextinguibles, la gloire de la création – ciel, étoiles, rocs, mers, plantes, animaux – sans que jamais il ne soit vraiment fait allusion à un Créateur. Ardeur de l’embrasement, foisonnement du Verbe, antidote à la mort. Et tentative magnifique de percer le mystère de la vie sur terre, ce pourquoi nous sommes là… et de chanter le monde, de l’embellir, de transpercer le voile et rendre visible l’imaginaire, le fabuleux, pour que notre joie demeure, toujours.

« Les étoiles se refermaient soigneusement autour de lui, l’entourant d’un globe total. Le silence était si parfait qu’au bout de très peu de temps il commença à entendre le grésillement même des étoiles. Cela commençait dans son œil par des palpitations ou par des élancements barbelés qui faisaient haleter toutes les constellations ensemble, comme à la suite d’un souffle des profondeurs qui aurait lentement attisé ses lointaines braises. Alors, dans le silence total qui emplissait ses oreilles comme d’une farine de son moulu très menu, il commença à entendre le crépitement des lointains brasiers. Les plus grosses étoiles craquaient d’une façon sourde et parfois poussaient un petit cri de cristal en accord avec les flammes dorées et bleues qu’elles lançaient. Les multitudes de poussières allumées qui, de tous les côtés, s’éparpillaient à travers la nuit, faisaient le bruit étouffé d’un frottement de chute de neige. Parfois, de la profondeur même du bruit sourd, s’élevait en augmentant le crissement d’un long jet d’or qui traversait le ciel du Nord au Sud d’une longue promenade lente de flammes, dans le sillage de laquelle la nuit refermée précipitait de nouvelles étoiles. A mesure que la nuit tournante faisait passer au zénith ses troupeaux d’étoiles, puis les inclinant les faisait descendre dans la mer, le chant grondant d’un côté de l’horizon montait avec des sonorités d’étoiles neuves. »

Fragments d’un paradis, de Jean Giono
L’Imaginaire Gallimard, 1974

texte (à part la citation) photos et illustration de couverture (c) DM, mars 2024

Avis de parution

Je suis très heureuse de l’annoncer :

mon premier recueil de poésie verra le jour cet été !

Le nombre de tirages étant limité, vous pouvez d’ores et déjà réserver votre exemplaire*, par exemple en me laissant un petit commentaire ci-dessous – ou en me contactant directement.

Imaginons que les étoiles du ciel se penchent sur nos berceaux pour nous murmurer des comptines, des berceuses, des chants de consolation, des mélopées d’espoir … ces chants deviendraient peut-être les poèmes qui vous sont livrés ici.

Ce livre est une invitation à une balade poétique et musicale au pays des vivants. En commençant par le crépuscule, il s’articule autour de quatre moments charnières de la journée, symbolisant la traversée des ténèbres pour atteindre la lumière. Ainsi va-t-il de chacun, ainsi va-t-il du monde.

Chaque étape de cette traversée initiatique est réhaussée d’une proposition d’écoute musicale pour accompagner le chant des mots et laisser s’exprimer la voix des émotions.

Cette promenade a été imaginée par Delphine Marie, écrivain-auteur de poèmes et de carnets de voyage, blogueuse, aventurière du monde et de l’esprit, amoureuse de la nature et de la vie. Sa poésie, suspendue entre le monde de la matière et celui de l’esprit, est une quête du grand vide, de l’unité, de l’espace où la boucle se ferme, où tout se résout, où il n’y a plus de questions.

Voici en avant-première un petit aperçu :

(cliquez sur les flèches ou balayez pour parcourir les 8 pages)

(c) Textes et illustrations Delphine Marie été 2023

* 20 € + frais de port

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Bribes

Les nuages se clairsèment et le ciel réapparaît
Un instant il est bleu,
l’instant d’après blanc comme le lait
Une goutte tournoie dans un éclair de vent
J’observe ma voix qui la suit en dansant

Un carré de TGV où 4 femmes se lisent
et se répondent dans le silence de leurs vies en filigrane
des regards noisette, bleus ou soubise…
qui s’éclairent quand le soleil s’invite
se font et se défont
se croisent et se décroisent
dans un soupir retenu qui plane
sur leurs lèvres sans jamais éclore complètement

Baisers d’hiver qui brisent leurs chaînes et jamais ne désespèrent de trouver une joue sur laquelle se poser
La vie a des surprises qui nous ramènent sans détour au flot du jour
La vie a de ces détours qui nous prennent par surprise la douceur peut entrer par chaque pore au moment où on s’y attend le moins
La vie a de ces pauses cacahuètes qui sonnent comme un clairon lorsque notre cœur est ouvert à la fête

Mon cœur a la fragilité d’une fleurette frémissant dans les pétales du vent
un jour le vent d’ouest le retourne une autre fois c’est le vent du nord froid et distant qui le saisit vent du sud et il chante des flamencos vent d’est il rentre dans son for intérieur pour explorer ses grandes steppes

(c) DM

The Pulse of the Earth

It is a large valley bordered by sandstone cliffs

shadowed by olive trees

a river runs through it

blocks of rock of potent origin

scissored in lacy designs

by lightning, water, sun, frost and wind

forced into shapes never seen

orange, terra-cotta, cinnamon

and the green, the evergreen of life

the scent of soil and acrid bushes

pungent leaves of thickets

wind sand and scorching rocks

lizards and duikers

ancestral land of the Bushmen

where live the leopard, baboon, antilopes

extreme land

either withered with heat or flooded

where grow the olive, almond, citrus and mango

stars exploding in diamonds

ancestors stories abound

a planet bright as a lighthouse

silence, wind, stars, rock,

sun, moon, water, birds,

river, cascade, hand paintings

rocks carved by the elements

heart of the earth pulsing

beauty beyond all thinking

majestuous features

parchment land, sizzling sandstone

hieratic cliffs

enigma demanding an answer

millions of years engraved in these rugged shapes

proteas, ericas, dassies and butterflies

discreet animal life, programmed to survive

bushes turned into gnarled shapes

colours as vivid as the sky

big skies as blue as the ocean itself

wild ether, unaffected

by the turbulence of humans below

sunsets baking in accomplishment

mountain, steady wall of ochre, red, chocolate

iron filaments in the stone

the elusive presence of the shy cape cobra

weaver birds, guinea fowls,

and the million invisible life

ever struggling for perpetuation

Life, ever evolving, ever transforming itself

mineral reign, animal, vegetal, and human, cohabiting

exchange of the hearts, bleeding with love

echoes of ancient memories

genes pairing and assembling

my genes responding to the call

Inner, irresistible call of blood

cellular coherence, proximity

Life in its kingdoms, ever renewed,

cells responding to each other

Desert call

Silence of the subtle matter

in the wind’s soft murmur

Vibration

Harmony

Life passed on a million years

astral light, merciless heat

rooted soul of the elements

the joy of leaves fluttering in the wind

making the sound of rain drops

windows shut to the scorching afternoon heat

the soft carpet of grass

giving in under the feet

foot imprints shaping the sand

paths of human and animal kind

rock paintings telling stories

of ancient shamanic trance

calling unto the elephant spirit

to come and heal the world

Very old tales told and seen

traces of ancient remedies

memories of past things

lived and gone

I want to stand up and scream : Happiness !!

(Cederberg, South Africa, march 2022)

(c) DM