La plage, toujours renouvelée

Soir d’été ; avant l’arrivée des grandes transhumances… les journées n’en finissent plus de mourir, l’air est intact, comme au premier jour. Chaque bruit semble filtré par un coussin d’azur si pur… tout est ralenti, heureux, obéissant à la simple loi de la lumière et de l’ombre. Le doré du soleil se pose sur les reliefs comme une caresse, et entame un entêtant déclin.

La mer est presque absente, discrète, en retrait, ondulant d’à peine une ride au bord de ses lèvres gelées. Au loin, quelques jeunes, un vélo, un ballon. Le regard ne sachant qu’embrasser en premier, se rétracte, laisse tomber l’habituelle avidité, cherche à l’intérieur les clés du mystère.

Le sable devient palette d’un peintre, chaque repli enfouit une histoire, un moment de la journée.

L’escalier pourrait descendre vers ce monde inavoué, mais il peut aussi monter. Il symbolise le passage, de la terre à la mer, de la force vers l’abandon, du matériel vers le non-dit, le libre, l’essentiel.

Sur son flanc, le lichen rougeoyant parle de mémoires de tempêtes.

One Day

 

One day, il fera clair, la tempête aura disparu

Tu t’assoiras au bord de la falaise,

les yeux clignant devant la beauté du monde

à laquelle tu auras enfin accès

 

Le cœur battant,

Tu entendras les étoiles filer en toi

Glisser comme une magie bienheureuse

 

Les accès se tairont, les voix se feront douces

En toi seul l’entendement règnera

 

Il y aura des villes, il y aura des promesses

Il y aura des enfants au regard aiguisé

Des sirènes, des montagnes de bricoles

 

Il y aura aussi la foi et la splendeur

Le regard sidéral de l’univers

Ancré en chacun, imaginé et réel

Indissociable de la fraternité

 

Et les glorieux traits de la vie emmêlée

Au chuchotement des cœurs

Guéris, épanouis.

Considérations à la verticale du temps

ou l'aspiration au bonheur
ou la guérison des lignées

Tout autour de nous conspire à être heureux

Il ne suffit que de regarder : Ouvrez les yeux !

Tout dans la création aspire au bonheur

 

La coccinelle qui cherche l’air à tire-d’ailes, la lune qui court après le soleil, le brin d’herbe qui se fraye un chemin à travers les pierres, l’arbre dont les racines soulèvent le goudron, la fleur qui s’extrait du béton; la tomate qui mûrit contre le mur gorgé de soleil; le petit être qui se débat pour vivre; notre cœur et celui de nos confrères humains.

 

Alors, pourquoi persistons-nous dans l’ignorance ?

 

Il est urgent d’attendre… attendre que l’éclosion se fasse, que la graine germe, que l’intention prenne vie et forme. Planter les intentions et attendre, les bonnes graines verront le jour, plus tôt que de prévu. Toujours dans la vie nous voulons tout, tout de suite. Nous pensons que les choses n’arrivent qu’aux hyperactifs, aux hyper volontaires, aux hyper optimistes. En fait, les belles choses prennent le temps de se défroisser. Les belles choses se cachent pour éclore. Les belles choses sont lisses, mystérieuses comme un pistil lorsque la fleur voit le jour pour la première fois, les belles choses se font belles en silence et dans le secret des antichambres du temps : elles ignorent les dimensions spatiales et temporelles, elles se font et se défont selon leur bon vouloir. Les belles choses sont un miracle qui défie l’entendement, une sinécure, une récompense. Les belles choses n’arrivent pas qu’aux autres !

 

L’humain est être animal, végétal et minéral : certaines choses se digèrent vite, immédiatement, d’autres lentement – parfois, sur des générations. Elles prennent des formes inédites, s’adaptent, se déforment pour contourner les obstacles, se reforment pour retrouver leur intégrité.

 

Notre génération a reçu des aïeux le devoir de faire le point, de mettre les choses au clair: lourde tâche que beaucoup d’entre nous ont portée. Ne leur en voulons pas pour cela. Ils se sont portés volontaires pour nous transmettre, dans leurs gènes, le meilleur et le pire. Ils ont vécu la guerre, n’oublions jamais cela; les horreurs d’un vingtième siècle inouï en violence dans une civilisation soit-disant évoluée. L’intérêt financier des trafics de drogues, d’armes ou de matières premières a pris le dessus sur l’évolution des consciences, qui était censée nous protéger de telles répétitions d’horreurs. En fait, les horreurs faites par les humains sur les humains n’ont pas changé, ce qui change c’est uniquement les technologies utilisées.

 

Nous sommes là, non pas pour sauver le monde, mais pour nous sauver; éventuellement, sauver notre famille. Ressusciter l’amour disloqué par les conflits familiaux, les non-dits, les schémas destructeurs ou pervers, les maladies. Redonner un fil rouge à la lignée de nos ancêtres, nettoyer les recoins sombres, mettre en lumière, voir, voir et encore voir, le plus clairement possible. En voyant nous libérons. En voyant nous trouvons un sens à nos souffrances. En voyant nous faisons don de notre générosité, aux générations passées, présentes et futures. En voyant, nous entrons dans le cycle éternel de la fin et du renouveau, sans peurs et sans reproches, nous tissons de nouvelles toiles, de nouveaux sens.

Nous redonnons vie aux fantômes ébouriffés qui jalonnent le chemin familial, nous combattons le mal pour redonner droit de parole au bien. Nous rééquilibrons les forces en présence, nous guérissons, nous ouvrons des portes. Nous arrêtons la malédiction, nous repensons notre venue au monde. Voir libère, et nous, et les autres qui nous entourent, ceux qui nous ont mis au monde, ceux qui sont nés et ceux qui ne sont pas nés de nous.